Voilà bien le type de débat qui n'existait pas jusqu'en 2005, date à laquelle la mention est devenue obligatoire et sur lequel on m'interroge désormais à chaque atelier de dégustation. Retour sur l'usage des sulfites, leur meilleure utilisation, leur désagrément et leur intérêt.
D'abord, le recours aux sulfites n'est pas unique au monde du vin. Si vous aimez la moutarde, la choucroute, la charcuterie sous vide, les cornichons, les fruits au sirop, les jus de fruits, les fruits secs (sauf les pruneaux, Agen est sauf !) ou même si vous utilisez de la cellophane, vous serez en contact avec ces diables de sulfites.
Un abricot sec, pour vous, c'est orange ? Erreur.....Sa vraie couleur est marron ! Mais comme le marron c'est pas vendeur, on lui rajoute des sulfites pour lui conserver sa belle couleur originale, appétissante et vendeuse. Et puis, un abricot sec sans sulfite délivre un goût de caramel... qu'on aime bien dans le carambar mais moins pour son fruit préféré.
Les sulfites (mentions E220 à E228 sur les étiquettes alimentaires) ont tellement de vertus dans la conservation des aliments qu'il est difficile d'y échapper. Il s’agit ni plus ni moins de l’une des manières les plus anciennes de préserver la nourriture, comme le salage.
Ils sont utilisés pour leurs propriétés anti-oxydantes, afin de préserver la couleur des aliments et prolonger leur durée de conservation (l'aliment s'oxyde s'il n'est pas protégé de l'oxygène contenu dans l'air) mais aussi pour prévenir la croissance de champignons ou de bactéries (propriétés antibactériennes et antiseptiques).
Il y a très longtemps que le soufre est utilisé en vinification. La première mention explicite de son usage remonte à un décret allemand de 1487 qui autorisait les vignerons à brûler des copeaux de bois soufrés dans des tonneaux utilisés pour la conservation du vin. Le soufre est alors connu et utilisé comme un désinfectant efficace.
Le terme "sulfite" plus précisément, correspond au dioxyde de soufre (SO2) , lui aussi d'un usage très ancien puisqu'on retrouve sa trace dès le 18ème siècle.
LES SULFITES, VRAIMENT DIFFICILE A EVITER DANS L'ELABORATION DU VIN
S'il permet à vos bouteilles de ne pas "madériser", le recours aux sulfites participe aussi à extraire la couleur des vins rouges, à achever totalement la fermentation alcoolique, de sorte que votre nez ne soit pas "chatouillé" par une forte acidité volatile désagréable.
Il protège le vin de bien des maladies, des reprises de fermentation en bouteilles (parce que vous aimez bien les bulles dans le champagne mais moins dans un vin rouge) et enfin, il garantit la tenue et la fraîcheur des arômes dans le temps (à moins que vous soyez fan de notes de pomme blette ou de chou bouilli dans les vins blancs).
Cela fait beaucoup d'avantages, non ?
Oui ! Mais en même temps, les vignerons souhaitent traduire le plus fidèlement possible l'expression de leur terroir. Or, on le sait,
les sulfites en trop forte quantité bloquent l’expression aromatique du vin.
Ils empêchent le vin d'exprimer tout son potentiel.
L'ensemble de la filière a donc depuis, revu totalement l'usage du soufre et on estime qu'aujourd'hui les quantités de soufre ont été divisées par 5. Malheureusement l'utilisation du soufre n'est pas répartie unanimement.
Interloire (le comité interprofessionnel des vins de Loire) s’est penché sur la corrélation entre teneurs en sulfites et qualité des vins. Son service technique s’est appuyé sur la dégustation et l’analyse de 900 références de vins. De manière générale, les vins acquis chez des cavistes ont des taux de sulfites particulièrement faibles, contrairement aux circuits du hard discount où les teneurs sont doubles.
UN USAGE DES SULFITES DE PLUS EN PLUS RESTREINT
Le vigneron ne manque pas de motivations à travailler proprement. Lorsqu’il conduit sa vigne sans produit chimique, lui apprenant ainsi à se défendre naturellement, il obtient des raisins sains qui ensuite, auront moins voire plus jamais besoin d'ajouts de sulfites à la vendange et en vinification.
En viticulture biologique notamment, l'usage est désormais d'utiliser le sulfitage uniquement à la mise en bouteille,
les sulfités étant le seul intrant non naturel, tous les autres étant bannis.
Ainsi, pour un vin en bio, la dose d'ajout de sulfites est +/- divisée par deux et en vins biodynamiques, +/- par trois, par rapport à un vigneron travaillant classiquement
(Je développerai une autre fois toutes les différences ente bio, biodynamie et vins natures).
Les sulfites, tels qu'utilisés actuellement, sont sans danger pour la plupart d'entre nous et il s'agit plus d'une intolérance alimentaire que d'allergie. Néanmoins si vous êtes allergique aux sulfites, votre option peut être d'aller vers des vins natures (sans sulfite ajouté car le vin en contient naturellement) qui n'autorise aucun intrant (donc sulfites compris) mais aussi aucune levure qui permette la fermentation, achetée dans le commerce.
Type de vinification "sans filet" et périlleuse, vous serez protégé des sulfites mais pas nécessairement de dérives aromatiques peu souhaitables, puisque votre vin ne sera plus protégé par ces mêmes sulfites.
A ce point de la recherche, il reste donc très difficile d'éviter le recours aux sulfites. Les alternatives ont donné de maigres résultats et proposent souvent de traiter le vin par des méthodes qui risqueraient d’enlever une partie de ses qualités … Ce n’est pas cohérent ! (sauf si l'objectif n'est pas un vin de qualité mais le vin sans sulfite ajouté comme produit marketing)
Quant au lien direct entre sulfites et maux de tête, aucune étude scientifique ne l'a à ce jour démontré. En revanche, cela à été démontré pour l'excès d'alcool.
Un conseil donc, buvez avec modération et si vous avez encore un doute, privilégiez des vignerons respectueux.
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