le vignoble du Douro

Les vacances se rapprochent et peut-être vous rendrez-vous au Portugal. Si tel est le cas, je ne peux que vous encourager à goûter les trésors viticoles de ce pays. Une ville en particulier requiert votre visite : Porto. Essentiellement réputée pour son vin muté, la région délivre aussi d’excellents vins secs qui méritent toute votre attention. 

Le Portugal est certainement le pays européen dont la qualité viticole a le plus progressé ces dernières années. En France, nous connaissons surtout les versions « Tawny » du Porto. Ces vins de type oxydatif, supportent certes un plus long séjour dans nos réfrigérateurs, mais concentrent aussi souvent la qualité la moins enthousiasmante. Pourtant, les vins mutés de Porto sont un univers à part entière, très complexe. Les grands Porto de qualité Vintage (millésimé) « trustent » même plusieurs places dans le palmarès des vins les plus chers au monde ! Il existe d’ailleurs un concours mondial, très relevé, de Master of Port. 

De passage à Porto, je vous incite donc fortement à visiter l’une de ces célèbres caves, afin de vous initier à l’univers passionnant de ce vin muté iconique.

Et, naturellement, je vous invite aussi à vous embarquer pour une journée de croisière à sillonner ce vignoble classé au Patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco. Un des plus beaux vignobles au monde, qui vous fait penser que les Hommes sont parfois un peu « fous ». Il faut voir ces milliers de kilomètres de vignobles en terrasses parfaitement aménagées. Ici, sous un soleil parfois écrasant, il faut être presque autant vigneron que maçon pour entretenir le vignoble.  

Évoquons maintenant ces vins secs du Douro. Moins connus, souvent issus des mêmes cépages que pour le Porto, ils connaissent depuis peu une reconnaissance mondiale.

Commençons par les vins blancs secs, issus principalement de cépages autochtones. Le Portugal en compte près de 400. Le « Redoma Branco » du célébrissime Dirk Niepoort offre une parfaite introduction. Issu principalement des cépages Rabigato, Codega et Viosinho, il délivre à la fois une grande fraîcheur et une belle élégance. L’émergence d’une clientèle de dégustateurs, plus axée sur l’expression minérale dans les vins que sur leur puissance et leur rondeur, convient parfaitement aux vins blancs portugais. À côté de cépages hyper aromatiques comme le Chardonnay, le Sauvignon et le Riesling, ces cépages portugais n’auraient peut-être pas pu émerger il y a 20 ans. Aujourd’hui ils trouvent facilement leur place à table, sur une gastronomie de poissons ou de crustacés. L’élevage de ce vin en barriques de chêne français dope néanmoins son expression aromatique et sa rondeur en bouche pour le rendre plus facile. Cependant, les arômes issus des raisins s’équilibrent bien avec ceux du fût. Le vin est finalement un brin crémeux, avec une acidité vibrante. 

Il vous faut aussi goûter à l’impressionnante collection de vins blancs de chez Luis Seabra (formé d’ailleurs chez Dirk Niepoort). Si vous aimez l’expression minérale dans les vins, vous serez largement comblé. Plantée sur schistes, chaque cuvée laisse une impression de « roche » en bouche. Luis fait vraiment parler l’expression des différents sous-terroirs du Douro, tantôt plus frais ou plus chauds, d’un secteur à l’autre. Ces différents terroirs, associés à un choix de cépage approprié, livrent des vins incroyablement différents, quand parfois seuls quelques kilomètres les séparent. Ce ne sont pourtant pas là des artifices en vinification qui font leurs originalités, Luis travaillant de façon naturelle. Toute la gamme est excellente, mais mention spéciale à la cuvée Granito Cru Alvarinho (cépage-phare du vignoble du Vinho Verde, secteur jouxtant le Douro). Le vin fait honneur à ce grand cépage, se distingue par une grande finesse, une belle aromatique sur le floral et le végétal noble, se concrétisant dans une finale minérale. 

Découvertes récemment, j’ai aussi apprécié des cuvées blanches très originales chez Aneto Wines, domaine assez récent puisque créé en 2001 (comme d’ailleurs beaucoup de « quintas » au Portugal). Leur cuvée Reserva branco associant Alvarinho et Sémillon (cépage très présent à Bordeaux, à Sauternes notamment et dans le Bergeracois) nous rappelle que des cépages habituellement recherchés pour leur potentiel à donner des grands vins moelleux, peuvent aussi se révéler comme de grands vins secs. L’univers aromatique autour du citron vert et de l’anis étoilé étonne dans cette partie septentrionale du Portugal. 

La dégustation des vins rouges de la région du Douro est certainement plus difficile pour nos palais français. Le cépage Touriga nacional, souvent dominant dans les belles cuvées, apporte beaucoup de structure et de complexité aromatique autour du fruit noir macéré. La cuvée « Rosa Réserve » de la Quinta La Rosa en est une parfaite illustration. Associé ici en plus au cépage Tinta Roriz (qui n’est autre que le célèbre Tempranillo, le cépage emblématique espagnol, notamment de la Rioja), le vin se révèle « solide » ! Heureusement, l’élevage sous bois tempère cette expression tannique. Mais, sans aucun doute, le vin embaumant la cerise noire aura un très bel avenir en cave. 

La cuvée Vieilles Vignes de chez Castella d’Alba, avec le même assemblage, offre une alternative plus facile d’approche. Le vin est manifestement travaillé pour offrir des tannins plus civilisés. On y perd un peu en complexité, mais à moins de 15 euros la bouteille, le rapport qualité-prix est excellent. 

Si vous aimez les versions plus fruitées, je vous recommande la dégustation de la cuvée rouge de la Quinta da Devesa. Avec une macération plus courte, extrayant moins de matière tannique, le style tourne à la « bombe fruitée » sur le cassis frais, le floral et la myrtille. On se fait vraiment plaisir sans sacrifier à un équilibre bien « foutu », entre fraîcheur et matière tannique. À 8 euros, on ne discute pas !

Alors si vous ne l’avez pas encore fait, foncez là-bas. Et si l’argument du vin n’est pas suffisamment convaincant pour vous, allez-y alors pour la belle gastronomie lusitanienne et la sympathie contagieuse du peuple portugais… Et au passage, n’oubliez pas de me rapporter des Pastéis de Nata de chez Castro à Porto. Dessert simple mais qui devient incroyablement délicieux chez eux.